Tout le monde connaît l'expérience de Bugeaud. Après avoir utilisé la troupe à effectuer les travaux préparant la colonisation, il pensa que les soldats seraient les meilleurs colons et ce furent en 1841-1842, fondées sur le travail en commun, les expériences d'Ain Fouka, Beni Mered et Mahelma. En juillet 1842, sur les 60 colons militaires tous célibataires, il fut décidé d'en envoyer vingt, les plus méritants à Toulon pour prendre femme. Ces jeunes filles avaient été auparavant pressenties, contre une dot et l'assurance de trouver outre le mari, une maison et des terres en Algérie. Entre septembre 1842 et janvier 1843, 18 d'entre eux se marièrent. Ces mariages se faisaient au son d'un roulement de tambour. Puis les jeunes filles ainsi mariées suivaient leurs nouveaux époux et tra versaient la Méditerranée pour trouver leur nouvelle patrie.

Dans divers centres les soldats libérés ont obtenu un grand nombre de concessions et parfois même la totalité comme à Pélissier, fondé en 1846 à l'est de Mostaganem sans autre nom que " les Libérés ", ou à Saint- André, à l'ouest de Mascara. Les mariages n'ayant pas arrêté le mouvement de dépopulation, il devint urgent de trouver une solution ;

Ce fut le capitaine Blanchet, commandant de la compagnie qui autorisa le curé d'Aïn Fouka à écrire à deux autres curés de l'Isère desservants les communes de Saint Hilaire et de Saint Bernard. Ces derniers s'efforcèrent de recruter des habitants partant pour immigrer en Algérie. Dix habitants de ces localités acceptèrent de quitter leur famille et leurs biens pour rejoindre Fouka, emmenant avec eux leur femme et leurs enfants. Le passage leur fut offert ainsi que leur installation.

Lettre de Soult à Bugeaud du 2 septembre 1843 " Je verrais avec plaisir que le village d'Aïn-Fouka reçoive un complément de population composée d'aussi bons éléments et qui ne pourrait qu'exercer une influence heureuse sur son développement et sa prospérité… " Le nombre de ces familles fût bientôt porté à 13 par l'adhésion de 3 nouvelles familles, et 7 d'entre elles avait pour chef d'anciens soldats.

Lettre de Soult à Bugeaud du 9 octobre 1843 " mon intention est donc qu'elles y soient placées de préférence à tout autre centre de population. J'attache de l'intérêt à ce que cette immigration, composée d'excellents éléments parvenus d'un même pays, soit concentrée sur le même point à Fouka.

Ces immigrants venus d'Isère sont :

GAUDE Jean, GAUTHIER Joseph, CHATAIN Pierre, de St Bernard;

GUIGUET Joseph, TILLOT Jean, de la Terrasse;

VIGAT Jacques, BOUVIER Etienne, TOURNOUD Pierre, PELLOUX Jacques CHATAIN Jean dit TANAZ, de St Hilaire

CHAIX Jacques, PERRET Pierre, GUIRAND Auguste de Crolles.

Parmi ces colons venant d'Isère, et plus exactement du plateau des petites Roches, Pierre CHATAIN a servi l'Empire pendant 6 ans, et a été prisonnier en Angleterre ; Joseph GUIGUET sort du 54e régiment de ligne ; Jean TILLOT sort de la Région de l'Isère ; Jacques VIGAT a servi 4 ans dans l'artillerie Sarde ; Julien TOURNOUD était à la 15ième de Légion, province d'Oran ; Jacques PELLOUX a servi l'Empire de 1807 à 1825.

Au recensement de Fouka au 1er janvier 1844 figurent : Pierre CHATAIN maçon, 52 ans (né vers 1792) sa femme Virginie, 49 ans (née vers 1795), ses filles Magdeleine (21 ans) repasseuse et Euphrosine (18 ans) modiste, et ses fils Jérome (15 ans) cultivateur et Pierre (11 ans) , tous habitants la maison n°8. Guillaume CHATAIN cultivateur 22 ans, maison n° 8. Joseph CHATAIN maçon, 27 ans (né le 5 juin 1816 à Saint Hilaire), sa femme Julie 25 ans (née vers 1819), son fils François (18 mois) et sa fille Marie (2 mois) habitent également la maison n°8. Jean CHATAIN cultivateur, 32 ans (né vers 1812), sa femme Magdeleine 32 ans (née vers 1812), ses fils Joseph (8 ans), Sixte (7 ans), Brice (4 ans), Jérôme (3 ans) et sa fille Marie (1 an), habitent la maison n° 3.

Lorsqu'ils arrivent à Fouka, en 1843, après un voyage long et difficile, ces familles sont dans un état de dénuement très grand. Aussitôt les autres habitants vinrent à leur secours en leur fournissant vivres et habits.

Joseph fait des travaux de maçonnerie pour faire vivre sa famille, en attendant d'obtenir une concession. Il est venu de Saint Hilaire avec sa femme Julie, son père Pierre et sa mère Virginie.

Il s'installe donc à Fouka et dès 1845 son premier enfant naît : c'est Joseph Antoine, puis vient Marie Magdeleine en 1846 ; Malheureusement, Joseph Antoine décède 3 mois après la naissance de Marie Magdeleine. Il vient d'avoir 22 mois. En 1847, c'est la naissance de Pierre Eugène Laurent Jean Baptiste, et en 1849 Marie Euphroisine arrive.

Je m'arrête sur Marie Euphroisine, car c'est notre arrière (arrière, arrière pour certains) grand-mère. Elle a rencontré Napoléon César Ledoux et ils se sont mariés en décembre 1868 à Fouka. La suite, on la connaît ; ils vont avoir 4 enfants, dont Clément Emile qui se mariera avec Thérèse Augusta Bellegarde ; Quatre enfants naîtront de cette union : Robert Albert, Emilienne, Odette et Armand. ( voir la page de Ledoux ).

Je reviens à Joseph le fondateur, pour dire qu'il aura son 5e enfant, Jérome Napoléon en 1850, puis Jean en 1852, Julie en 1854, Pierre Napoléon en 1856, Léon en 1861. Tous ne vivent pas longtemps : ainsi, Pierre Eugène Laurent Jean Baptiste décède en 1851 à l'âge de 4 ans, Léon en 1861 à l'âge de 8 mois.

Joseph fait sa première demande de concession le 29 août 1848 et l'obtient le 7 mars 1850 à Fouka. Ce sont le lot n°3 à bâtir, et 4 lots de campagne qui représentent 10 ha et 3 ares. En 1853 il obtient un titre de concession à Fouka, pour 3 lots : le lot n° 1 de jardin d'une superficie de 2 ares 20, un lot n°23 de vignes de 24 ares et un lot n° 68 de prairie de 2 ha. Mais ceux ci deviennent rapidement trop petits pour faire vivre sa famille et il se voit contraint de les revendre.

Il vit alors de travaux de maçonnerie. Le 30 novembre 1871 il renouvelle sa demande pour un lot plus grand, situé dans les Yssers, à Bordj Menaïel; Ses enfants ont grandi; ils habitent toujours chez leurs parents, du moins ceux qui sont encore célibataires, et peuvent eux aussi travailler sur les terres. Il n'obtient pas de réponse, bien que sa demande ait été appuyée par Jean Baptiste Eyraud, l'ami de tous les moments, et qui agit en tant que conseiller municipal délégué. Le 13 janvier 1877, il fait à nouveau une demande pour une concession dans l'une des 8 fermes annexées au village de Ben Aroun, arrondissement de Tizi Ouzou. Ses enfants ont alors 27 ans ( Jérome), 23 ans(jean), 19 ans (Pierre), et 18 ans (Pauline; en fait c'est Julie Clémence qu'on appelle ainsi ). Les 3 autres enfants vivants sont mariés.

Il possède 2 500 francs, 2 boeufs, 1 vache, 1 génisse, 4 moutons, une petite maison à Fouka; Il réside en Algérie depuis 34 ans, c'est un colon de la première heure, toute sa famille jouit d'une très bonne réputation; Ses enfants sont rompus aux travaux agricoles qu'ils ont l'habitude d'effectuer, en plus des travaux de maçonnerie. Tout cela fait qu'enfin sa voix va être entendue; Il n'y a plus de lot à Ben Aroun, ni à Chabet El Amar, lots réservés aux colons venus du Vaucluse, mais en décembre 1877 il obtient enfin sa concession située à Aïn Zaouïa. Par tirage au sort il obtient le lot urbain n° 31 et les lots ruraux n° 175, 125 et 65 d'une étendue de 28H55.70.

Malheureusement, il meurt le 1er octobre 1884, laissant sa veuve Julie et ses fils Jean et Pierre Napoléon, gérer les terres, avec son petit fils Edouard Joseph, le fils de sa fille Marie Magdeleine, décédée le 7 mars 1873 à l'âge de 28 ans.

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